Les troubles alimentaires et l’anxiété

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Publié le 27/02/2020
27/02/2020

Par Vanessa Germain, psychologue
EXTRAIT du livre « Clara : mieux vivre avec les désordres alimentaires à l'adolescence » > Chapitre 7 : Calmer ton anxiété


« Mon humeur est de plus en plus négative, particulièrement depuis la dernière année. Avant, j’étais remplie de joie de vivre et ma vie ne me paraissait pas si compliquée ! On dirait que je suis constamment préoccupée, maintenant. « Est-ce qu’on va m’aimer ? Est-ce qu’on va me juger, me rejeter ? Suis-je à la hauteur ? Suis-je moins belle que toutes les autres filles de ma classe ? Vais-je réussir mes examens ? » 

Extrait de Clara, mieux vivre avec les désordres alimentaires à l’adolescence

As-tu déjà eu cette impression forte et angoissante de perdre le contrôle de ta vie ? Les enjeux alimentaires cachent souvent bien d’autres difficultés. Sans remonter à la source du problème, ce sera difficile de guérir. Il sera utile de te questionner sur tes comportements et de comprendre à quoi ils servent exactement. Qu’est-ce que ça t’apporte de ne pas manger, de faire autant d’exercice, de t’isoler ? Les raisons peuvent varier beaucoup d’une personne à l’autre. 

De manière consciente ou inconsciente, ton désordre alimentaire peut répondre à certains besoins non comblés dans ta vie. Je te donne quelques exemples.


Pourquoi je refuse de manger…



  • Pour ne pas devenir grosse, parce que je crains autrement d’être jugée ou rejetée.
  • Pour réduire mon anxiété.
  • Pour faire réagir mes parents (les punir, les culpabiliser, les inquiéter, etc.).
  • Pour exprimer un désaccord de manière indirecte afin de maintenir mon système familial (par exemple, mes parents sont sur le point de se séparer, mais ils ne le feront pas tant que je serai malade).
  • Pour attirer l’attention, pour recevoir plus de soins et d’encouragements.
  • Pour me punir moi-même d’un aspect plus difficile à admettre (par exemple, je ne mérite pas de manger, je suis une mauvaise personne).
  • Parce que c’est le seul aspect que je parviens à contrôler efficacement dans ma vie.
  • Pour me sentir performante, supérieure et sentir que j’accomplis quelque chose. Je réussis et j’en suis fière 



« Je doute à chaque instant. Je me mets une pression incroyable sur les épaules pour être parfaite dans tout : à l’école, en gymnastique, dans mes relations avec mes amies, avec mes parents, avec mon chum et, surtout, dans mon corps ! Je suis allergique à l’échec. Comme si le fait de performer était la seule chose qui comptait désormais. Avant, ces idées ne me traversaient jamais l’esprit mais, maintenant, c’est comme une obsession. Et que dire de tous ces changements dans mon corps depuis les dernières années. Mes fesses, mes hanches, mes cuisses, mon ventre, mes seins… je panique ! » 

Extrait de Clara, mieux vivre avec les désordres alimentaires à l’adolescence

Pas de panique !

Le fait d’adhérer aux règles strictes que te dicte ton gourou crée un sentiment de menace permanent qui active ton système nerveux. Ton corps se mobilise donc à chaque repas pour se préparer à réagir comme s’il y avait un vrai danger même si, en réalité, s’alimenter constitue à l’inverse un besoin vital. Les moments de repas sont fréquents dans une journée. Imagine les tensions que subit ton corps au quotidien ! Ce stress intense justifie l’importance d’apprendre à te détendre régulièrement. Est-ce qu’il t’arrive de ressentir des douleurs musculaires, de la difficulté à dormir, de l’irritabilité ou une impression d’être toujours à fleur de peau ? Ce sont des signes que tu dois aider ton système nerveux à se calmer !

Surmonter sa peur…petit à petit

Bon. C’est bien beau tout ça, mais tu sais, tu devras aussi faire face à ta peur pour guérir. Je t’informe donc dès maintenant que tu ne pourras pas surmonter ton désordre alimentaire sans t’exposer à la nourriture, tout comme il est impossible de traiter une phobie des ascenseurs… sans monter dans un ascenseur !

Il est très important de t’exposer de manière graduelle. Commence par des situations inconfortables, mais tolérables pour toi. Répète l’exercice assez souvent pour commencer à t’habituer. Par exemple, si c’est difficile de manger du beurre d’arachide le matin, refais-le jusqu’à ce que ce soit acceptable pour toi. Ensuite, tu pourras passer à l’étape suivante.

À force de t’exposer ainsi, tu verras que les situations te paraîtront de moins en moins souffrantes et que le scénario catastrophique que tu imagines ne risque pas de se produire. Par exemple : « J’ai mangé mon déjeuner et finalement, personne n’a rien dit à mon sujet, mon corps n’a pas subi de transformation extrême, personne ne m’a rejetée ». L’exposition te permettra aussi de développer un peu plus de flexibilité dans tes routines. Par exemple, si tu as tendance à manger toujours la même sorte de céréales le matin, il serait grandement temps d’intégrer quelque chose de nouveau… pourquoi pas une rôtie, demain matin ?

LIRE AUSSI : 

Retrouvez d’autres conseils pour surmonter les désordres alimentaires dans le livre Clara : les désordres alimentaires à l’adolescence.


À propos de l’auteure

VANESSA GERMAIN, Ph. D., psychologue

Vanessa Germain se spécialise entre autres dans le traitement des troubles anxieux, des troubles de l’humeur et des troubles alimentaires chez les adolescents et les adultes. Auteure de nombreux articles scientifiques, elle est également formatrice, conférencière et fondatrice de la Clinique Argyle, sur la Rive-Sud de Montréal.

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