Le racisme et nous : entrevue avec Héléna Bouzi
Parler de racisme avec les jeunes n’est pas une tâche facile. Mais face à la montée préoccupante de l’intolérance au Canada et ailleurs, il est plus que jamais essentiel de continuer de sensibiliser les jeunes (et les adultes aussi!) au racisme si l’on souhaite bâtir un monde plus inclusif. Et c’est ce que fait la psychoéducatrice Héléna Bouzi dans son nouveau livre Le racisme et toi. Son objectif? Offrir des stratégies engageantes aux jeunes de 10 ans et plus pour les aider à faire face à la discrimination et à promouvoir des valeurs d’égalité, de respect et d’ouverture!
Dans cette entrevue, elle nous explique ce qui l’a poussée à écrire ce livre, pourquoi le sujet reste d’actualité en 2025 et comment enseignants, intervenants et parents peuvent utiliser son livre pour aider les jeunes à devenir eux aussi de véritables alliés de la cause antiraciste!
Qu’est-ce qui t’a poussée à écrire un livre sur ce sujet, et pourquoi avoir choisi de t’adresser directement aux jeunes?
H. B.: À l’hiver 2024, il y a eu des propos racistes dans les médias québécois. Ces propos m’ont fait vivre de la colère et aussi de l’incompréhension: comment se fait-il que, encore aujourd’hui, de tels propos soient diffusés sur les réseaux sociaux? Je me suis dit qu’il y avait clairement un manque d’éducation. En faisant mes recherches, je n’ai pas trouvé de livre québécois qui vulgarise ce qu’est le racisme de manière concrète. Alors j’ai décidé de l’écrire!
Je m’adresse aux jeunes, car ils sont l’avenir. Ils sont encore en apprentissage et les éduquer sur ce sujet va leur permettre d’évoluer dans un monde plus ouvert face à la différence. Les jeunes sont aussi une excellente porte d’entrée vers les adultes. Ils vont aller poser leurs questions et défier les croyances des adultes qui les entourent!
Pourquoi est-il encore essentiel de parler de racisme au Québec (et ailleurs!), en 2025?
H. B.: Les personnes racisées peuvent subir des microagressions ou vivre des incidents en lien avec le racisme systémique tous les jours, même au Québec. Récemment, j’ai vécu une microagression en me faisant dire que je n’avais pas d’accent. L’individu était surpris de cela. Certaines personnes pensent qu’une personne racisée ne peut pas être québécoise. Ce type de pensées, et bien d’autres, doivent changer, car elles influencent les politiques mises en place et sont associées à des stéréotypes qui nuisent au quotidien des personnes racisées.
Le racisme est-il encore un problème dans les écoles, aujourd’hui?
H. B.: Malheureusement oui… Dès l’âge préscolaire, les enfants commencent à avoir des biais positifs pour leur groupe ethnique. Ils remarquent davantage les différences. Ils peuvent exclure les enfants qui sont différents d’eux et avoir des propos dévalorisants. Les microagressions sont aussi bien présentes et les jeunes ne sont pas éduqués sur ce sujet. Ils ne sont pas conscients que leurs propos et leurs comportements, d’apparence banale, affectent négativement le quotidien des personnes qui en sont victimes. Il est donc essentiel de faire de la prévention dans les écoles.
De quelles façons les intervenants et les enseignants peuvent-ils utiliser ton livre?
H. B.: Le livre est un outil très concret. Ils peuvent utiliser les mises en situation pour faire comprendre certains concepts, et les quiz à la fin de chaque section pour évaluer les connaissances des élèves. Les petites capsules historiques peuvent, par exemple, être utilisées pour faire des projets d’écriture ou de présentations orales.
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Dans chacune des sections, il y a des suggestions d'activités pour faciliter la compréhension. De plus, il y a des fiches pédagogiques gratuites associées au livre qui s’intègrent parfaitement en classe ou dans les milieux d’intervention. Le livre est aussi un bon point de départ pour les parents qui souhaitent entamer une discussion sur le racisme avec leurs enfants. Puis si, malgré tous ces outils, les intervenants et les enseignants ne se sentent pas en mesure de parler de racisme, j’offre moi-même des ateliers pour les jeunes. Il me ferait plaisir de venir dans leurs milieux.
Qu’espères-tu que les jeunes (et les moins jeunes!) retiennent après avoir lu ton livre? Quel est le principal conseil que tu leur donnerais pour devenir de véritables alliés de la cause antiraciste?
H. B.: Que c’est beau, la différence. Que nous sommes tous égaux. Qu’il est important d’être ouvert face à l’autre, de faire preuve d’inclusion et de respect. Qu’il faut remettre en doute nos biais, ne rien assumer quand on rencontre une nouvelle personne. Le principal conseil pour être un allié est: tu vois quelque chose, tu dis quelque chose! Ne restez pas silencieux face aux injustices et aux propos racistes. Toutes les petites actions comptent!