5 choses à savoir sur le syndrome de la Tourette

Syndrome de Gilles de la TouretteBesoins particuliers
Publié le 14/05/2017
14/05/2017

Connaissez-vous le syndrome de Gilles de la Tourette (SGT)? Généralement méconnu et mal compris, ce trouble neurologique entraine plusieurs défis pour les enfants qui en sont atteints. Pour marquer le début du mois de sensibilisation au SGT, nous avons demandé à Dominique Vézina, auteure du livre Laisse-moi t’expliquer… le syndrome de Gilles de la Tourette, de nous en dire plus. Entrevue.

Propos recueillis par Marie-Anne Dayé


1. Quels sont les symptômes du SGT et quand faut-il consulter? 


On dit que les problématiques reliées au syndrome de Tourette ressemblent à un soleil. Au centre, ce sont les tics moteurs et sonores sans lesquels le diagnostic ne pourrait être émis. En effet, pour diagnostiquer le SGT, un spécialiste doit pouvoir observer la présence d’au moins deux tics moteurs (par exemple, cligner des yeux, hausser les épaules ou grimacer) et un tic sonore (par exemple claquer de la langue ou renifler) sur une période de plus d’un an, et ce, avant l’âge de 18 ans. 

Puis, tout autour, les rayons du soleil sont les troubles associés, variables d’une personne à l’autre  : déficit de l’attention, avec ou sans hyperactivité, impulsivité, immaturité, trouble obsessionnel compulsif (TOC), troubles d’apprentissage (dyslexie, dysorthographie, dysgraphie, dyscalculie, dysphasie, trouble d’accès lexical, etc.), troubles d’organisation et de planification, trouble de l’humeur, troubles anxieux, épisodes explosifs, trouble d’opposition et de provocation, trouble du sommeil. 

Si les tics et les troubles associés apportent de la souffrance ou nuisent à la vie quotidienne de la personne atteinte, par exemple à l’école, au travail ou dans ses relations sociales, il y a lieu de consulter un spécialiste.


2. Est-il vrai que la personne aux prises avec un SGT profère toujours des insultes et des mots vulgaires?


Non, c’est faux. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, seulement 10 à 15% des personnes atteintes du SGT souffrent de coprolalie. Mais comme l’image est frappante, plusieurs croient que toutes les personnes atteintes répètent des vulgarités et des insultes, alors que c’est loin d’être le cas !


3. À quoi ressemble une journée dans la vie d'un enfant atteint du SGT? Quels défis doit-il relever?


Chaque enfant atteint est bien différent, mais les défis qu’ils rencontrent sont semblables sur le plan des tics ou des troubles associés, selon ceux qu’ils présentent. Voici un exemple de journée d'une famille avec une fille et un garçon Tourette.

Dès le réveil, il y a beaucoup de bruit. Le garçon fait de l’écholalie (il répète systématiquement des sons, des mots ou des chansons) et démarre son disque à un volume élevé! Vite, il prend une médication pour le TDAH, les tics et l’anxiété. La fillette tousse, re-tousse, re-re-tousse. Elle n’est pas malade, c’est son tic sonore principal. Puis, la maman invite ses cocos à suivre leur routine. Chacun a ses responsabilités, il y a des listes pour ne rien oublier (plus jeune, c’était des séquences de pictogrammes). 

C’est l’heure de l’école. Deux enfants, deux réalités. La fillette surmonte ses difficultés grâce aux efforts qu’elle met et aux aides technologiques utilisées en classe depuis des années. La dyslexie et la dysorthographie ne l’ont jamais empêchée de performer à l’école. Le garçon a quant à lui besoin d’un coup de pouce de plus au secondaire en classe de soutien émotif. Il fréquente un groupe à effectif réduit (huit élèves, un enseignant, une technicienne en enseignement spécialisée) et a besoin de l’aide d’une orthophoniste à l’occasion. S’ajoute à cela le défi des relations avec les pairs. Pour fillette, c’est facile. Elle a de nombreux amis. Pour le garçon, bien qu’il soit habile pour entrer en relation avec les autres, il n'arrive pas à maintenir des liens harmonieux avec eux, car il a de la difficulté à interpréter leurs émotions et à décoder les expressions.

Après l’école, chacun vaque à ses occupations. Bien sûr, plus tout le monde est fatigué, plus il y a d'accrochages. Certains enfants n’aiment pas trop se faire toucher en raison de leurs problématiques de défenses sensorielles. Une crise de colère peut vite se déclencher! Même les coutures de leurs vêtements sont irritantes, donc le pyjama tout doux se porte dès l’entrée dans la maison comme une libération de la torture des vêtements agaçants de la journée!

Puis vient le moment des devoirs. Il faut être un vrai chef d’orchestre pour arriver à diriger tout le monde sans explosion durant cette période à haut potentiel de risque. Lorsque les enfants étaient petits, les parents sortaient mille et un outils (horloge visuelle, dictionnaire Eurêka, bidules sensoriels, crayons de toutes sortes, aide-mémoire, ordinateur). La table en était pleine! L’aide aux devoirs de la bibliothèque municipale s’avère parfois une option intéressante. En effet, c’est plus gênant pour un jeune de faire une colère lorsqu’il est en présence d’autres adultes compétents!

À l’heure du souper, tous mangent et racontent leur journée. Fiston a toujours faim (effet secondaire de la médication et de l’adolescence). Fillette enroule ses pieds aux barreaux de sa chaise pour ne pas donner de coups de pieds à tout le monde sous la table — son tic du moment. L’humeur est variable, comme dans toutes les familles... mais puisqu'il y a un manque d’inhibition et une grande impulsivité dans les troubles associés, chacun ne filtre pas ses commentaires tout le temps comme il le faudrait. Résultat, parfois c’est très drôle, parfois c’est la catastrophe! 

Au coucher, chacun a sa routine qui le mène à un sommeil qui tarde à venir. C’est le moment où mille pensées envahissent leur tête. L’anxiété est au rendez-vous. Fillette prend une capsule de mélatonine pour l'aider à s’endormir, le garçon lit un livre pour se changer les idées. Lorsqu'ils étaient petits, les nuits étaient courtes! Ils faisaient de longues crises avant de s’endormir enfin, épuisés.


4. Comment ce syndrome affecte l'enfant lors de son passage à l'adolescence?


L’adolescence est une période plus sensible où le besoin naturel de s’affirmer s’ajoute à la dynamique déjà compliquée du SGT. Les tics sont toujours présents et compliquent la recherche d’un groupe d’amis. Les parents restent des alliés importants pour accompagner les adolescents atteints dans toutes les sphères de leur vie, même si la relation avec l’adulte est parfois difficile durant cette période. 

Les ados atteints du syndrome sont plus à risque de développer une dépendance aux drogues et à l’alcool lorsqu’ils ne sont pas médicamentés. Ils chercheront ainsi à calmer leurs symptômes par l’utilisation de ces substances.


5. De quelle manière les parents, les enseignants et les intervenants peuvent agir pour soutenir l'enfant qui a un SGT?


Pour commencer, il faut éviter de mettre l’accent sur les tics que l’on remarque chez l’enfant Tourette. Plus on lui parle de ses tics, plus il aura envie de les faire. Il est donc préférable d’ignorer les tics.

On peut travailler avec l’enfant la gestion de son anxiété en lui donnant des outils concrets pour identifier et mieux contrôler les épisodes de stress, où les tics sont plus nombreux. Il est aussi très utile de l’aider à découvrir le monde des émotions, car plus il sera habile pour nommer comment il se sent et pour décoder les émotions des autres, mieux il gèrera ses relations.

Présenter aux enfants des techniques de résolution de conflits concrètes est également une bonne idée. Les enfants atteints du SGT ont besoin de travailler les scénarios sociaux. La vie en société comporte beaucoup de conventions, de règles de politesse qui ne sont pas expliquées, mais que les gens adoptent par observation. Pour les personnes atteintes du syndrome, ce n’est pas si simple. On doit leur expliquer le comportement attendu, leur fournir le mode d’emploi et le leur rappeler constamment.

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